Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
Histoire électorale de Banyuls sur mer
Histoire électorale de Banyuls sur mer
Publicité
L'Auteur

Claude Razouls-1

Visiteurs
Depuis la création 2 431
Archives
27 août 2017

30 - Présidentielles des 1er et 15 juin 1969

30 - Présidentielles des 1er et 15 juin 1969

 

Le départ volontaire du général de GAULLE, à la suite de l'échec du référendum sur la réforme régionale et du Sénat, impose une nouvelle élection présidentielle, la seconde avec ce mode de scrutin sous la Ve République.

Nul n'ignore depuis longtemps que Georges POMPIDOU sera candidat (déclaration de Rome le 17 janvier 1969) (1). Certains gaullistes lui feront reproche de cette "candidature anticipée " qui supprimera lors du référendum l'argument du "Moi ou le chaos", cher au Général.

Valéry GISCARD D'ESTAING et son fidèle lieutenant Michel PONIASTOWSKI se sont fait aussi quelques ennemis parmi les gaullistes purs et durs en cette occasion.

Quoi qu'il en soit, et suite à l'activité de POMPIDOU en faveur du référendum, celui-ci est soutenu par l'UDR et les Républicains Indépendants. C'est donc avec un candidat unique que les défenseurs de la Ve République iront à la bataille, et forts de leur infrastructure parlementaire et de leurs réseaux gaullistes.

A gauche, le Parti Socialiste SFIO est en pleine restructuration, la FGDS n'existe pratiquement plus. Lors de son congrès à Alfortville, Gaston DEFFERRE "profite" de la fin de la soirée (les délégués de province étant pour nombre d'entre eux partis) pour se faire "introniser" candidat à la stupéfaction de nombreux délégués qui protesteront (non contre l'homme, mais sur le principe).

Faute de concertation le PCF présentera son vieux leader Jacques DUCLOS, et le PSU: Michel ROCARD.

La Ligue Communiste Révolutionnaire présente l'une des figures de Mai 1968 : Alain KRIVINE.

Une seule candidature sans grand sens politique: Louis DUCATEL (ancien conseiller municipal de Paris).

Devant la désunion de la gauche et les pratiques de certains gaullistes, un candidat inattendu se manifeste: le Président du Sénat (maire de la petite commune d'Ablon près de Paris, démocrate-chrétien, très européen) et Président de la République par intérim (2).

Alain POHER annonce sa candidature à la veille de la clôture des inscriptions. Il a pour lui plusieurs handicaps : le peu de temps pour une campagne, le fait qu'il soit peu connu des Français, et surtout, comme il me le sera confirmé ultérieurement, son souci d'équité entre les candidats. C'est un centriste européen et modéré, sans ambition particulière autre que celle de la présidence du Sénat. Il dispose de peu de soutiens sinon d'une partie des Centristes, et de J-J. SERVAN SCHREIBER qui dénoncera "l'Etat UDR" et le pouvoir faussement débonnaire de Pompidou.

La campagne ne passionne guère les foules. POMPIDOU comme POHER ne cherchant aucune dramatisation (tout le monde a encore en mémoire les événements de 1968 et leur ... conclusion).

Si le premier est déjà bien connu et ne doute pas de l'emporter, le second se révèlera plus ferme qu'on ne le supposait.

DEFFERRE tentera de créer un "choc psychologique" en associant Pierre MENDÈS  FRANCE à sa campagne (3). Mais une certaine nonchalance et son élocution "marseillaise" le desserviront.

La révélation viendra de Jacques DUCLOS qui, à 73 ans, fera une campagne télévisée très percutante et déploiera à travers le pays une activité toute juvénile.

Beaucoup envisagent une défaite de POMPIDOU . . .  revanche de 1968, jusqu'au jour où J. DUCLOS, traduisant une décision de PCF, affirmera que POMPIDOU ou POHER c'est " bonnet blanc et blanc bonnet".

 

Résultats (1er tour) :

                     Banyuls                              Département                    Métropole

Inscrits:         2799 (+ 167 / 1965)             169.909                         28.779.041

Abst.:              786 (28,09%)                     (26,53%)                       (21,80%)

Votants:        2013 (71,91%)                     (73,47%)                       (78,20%)

Blancs:              17 (  0,85%)                     (  1,32%)                       (  1,28%)

S.Expr.:        1996 (71,31%)                     (72,49%)                       (77,10%)

POMPIDOU: 631 (31,6% S.E)                (38,5% S.E)                  (44 % S.E )

POHER:         582 (29,15% - -)                (23,50% - -)                  (23,40% --)

DEFFERRE:              133 (  6,66% - -)    (  4,36% - -)                  (  5,10% --)

DUCLOS:      492 (24,65% - -)                (28,31% - -)                  (  21,5% --)

ROCARD:       87 (  4,35% - -)                (  3,03% - -)                  (  3,70% --)

KRIVINE:        30 (  1,50% - -)                (  1,11% - -)                  (  1,10% --)

DUCATEL:      41 (  2,05% - -)                (  1,14% - -)                  (  1,20% --)

 

Remarques :

            Les abstentions sont élevées si l'on se reporte à celles de 1965 (+348 ou +11,50%) et traduisent bien que l'enjeu ne paraît pas déterminant, ensuite que les candidats sont aussi moins attractifs.

 J. DUCLOS fait moins de voix que le candidat du PCF au 1er tour des législatives de 1967 (-111 ) et que . . . André SOLEING aux municipales de 1965 (-91).

 G. POMPIDOU arrive en tête, mais naturellement moins que ne l'avait fait DE GAULLE en 1965 (- 150), et moins bien qu'au référendum malheureux de 1969 (-48).

Gaston DEFFERRE s'effondre, aussi bien à Banyuls qu'aux niveaux départemental et national. C'est triste pour lui, mais logique puisque sa candidature n'a pas été acceptée par de très nombreux militants du PS (ni dans le fond, et encore moins dans la forme). La section locale du PS ayant recommandé de ne pas voter pour le candidat de son propre parti!  Son score à Banyuls est sans grande signification, il est probable que cela est vrai ailleurs.

Alain POHER bénéficie naturellement de cette situation pour faire un score honnête, plus fort en pourcentage à Banyuls qu'au plan national (+5,50%), ce qui montre, à la surprise générale, que POMPIDOU pourrait être arithmétiquement battu.

Le score de Michel ROCARD confirme l'existence à Banyuls d'un noyau dur de PSU non déclaré.

 

Pour le second tour restent donc G. POMPIDOU et A. POHER. Mais comme tout le laissait prévoir, le PCF appelle à l'abstention, refusant le choix entre un "centriste" et un "gaulliste" (on ne choisit pas entre "la peste et le choléra"). Le PSU fait de même, tandis que KRIVINE recommande le vote nul.

A l'inverse, les Partis socialiste et radical soutiennent POHER, DEFFERRE se désistant pour lui. Entre deux maux ne faut-il pas choisir le moindre ?

Seul DUCATEL se désiste en faveur de POMPIDOU, mais ne représente que 1% au plus.

                 

Résultats (2 ème tour) :

                        Banyuls                             Département                  Métropole

Inscrits:          2799

Abst.:               835   (29,84%)                 (32,38%)                       (30,90%)

Votants:        1964   (70,16%)                 ( 67,62%)                      (69,10%)

Blancs:               99   (  5,04%)                 (   8,03%)                      (  6,52%)

S.Expr.:        1865   (66,63%)                 ( 62,18%)                      ( 64,60%)

 

POHER:       1128   (60,40% S.E)           (47,44% S.E)                 (42,40 % S.E)

POMPIDOU:  737   (39,51%  -  -)           (52,55% -   -)                 (57,60 % -   -)

 

Remarques :

Les abstentions sont encore plus élevées que lors du premier tour (+49), comme d'ailleurs les votes volontairement nuls (3,53% des inscrits et 5,04% des votants).

Alain POHER progresse considérablement (+546) et réalise un pourcentage anormalement élevé à Banyuls de +12,96% et +18% par comparaison à ceux du département  et de la métropole. Lors du dépouillement  du scrutin, Marie-Ange PY (gaulliste de toujours) avait un visage consterné en me demandant s'il en serait de même ailleurs qu'à Banyuls. Je la laissai à son "angoisse", sachant qu'un accord tacite était intervenu entre les socialistes locaux et la cellule du PCF, via André SOLEING, pour ne pas forcer sur le thème de l'abstention . . . petite consolation locale à une élection déjà acquise d'avance sur le plan national.

POMPIDOU ne pouvait que faiblement progresser d'un tour sur l'autre, sauf en mobilisant les abstentionnistes du premier tour, ce qu'il fit, soit +106 voix.

Un examen attentif du registre électoral révèle un chassé-croisé des électeurs (déjà signalé antérieurement). A savoir, que 214 inscrits, abstentionnistes au 1er tour, sont venus voter au second, alors que 263 inscrits, venus au 1er tour, ne sont pas revenus au second. Soit un chassé-croisé représentant 8,54% des inscrits.

 

Si POMPIDOU n'obtient que 39,51% des S.E. à Banyuls, sur les plans départemental et national il l'emporte largement avec 2.817.495 voix de plus, soit +15,20%.

 

Notes annexes :

(1) Cf. Georges POMPIDOU: Pour rétablir la vérité. Edit. Flammarion (1982). Ouvrage qui répond à ceux qui ont vu un complot pour abattre DE GAULE (cf. Louis Vallon: L'anti De Gaulle. Edit. Seuil,1969). Il sera exclu de l'UDR et appellera à voter pour MITTERRAND en 1974.

(2) Alain POHER prenant ses fonctions à l'Elysée n'y trouvera aucun papier ni crayon (témoignage à l'auteur). Voir aussi le Rapport de la commission d'enquête sur les activités du Service d'action civique: J.O. du 18 juin 1982. 2 tomes parus en 1982 (Edit. Alain Moreau). Cf. Jacques FAIZANT: Les caprices de Marianne. Edit. Denoël (1969).

(3) Cf. Jean LACOUTURE: Pierre MENDÈS FRANCE. Edit. Seuil (1981). Ouvrage publié un an avant le décès de P.M.F. (18/10/1982).

 

Note complémentaire :

Le 21 juin, POMPIDOU nomme Jacques CHABAN-DELMAS Premier ministre. Devant l'Assemblée nationale il présente le 16 septembre son projet de "Nouvelle Société" sous l'inspiration de son conseiller aux affaires sociales Jacques DELORS (issu du syndicat CFDT) (1), mais sans concertation avec son Président. Ce thème très politique que constitue la participation constituera l'une des causes de dissensions entre les deux hommes. Le Premier ministre après avoir obtenu la confiance le 17 mai 1972 (par 368 voix contre 96 et 6 abstentions), démissionnera le 5 juillet en raison de l'hostilité  des Républicains indépendants (Michel PONIATOWSKI) entre autres.

            Pierre MESSMER est désigné comme Premier ministre et forme de 6 juillet son gouvernement, peu différent du précédent, sinon l'entrée de gaullistes historiques, mais toujours avec la présence aux Finances de V. GISCARD D'ESTAING.

            En ce qui concerne notre département, Arthur CONTE, soutien de POMPIDOU depuis les évènements de mai 1968, est nommé PDG de l'ORTF.

 

Note annexe:

(1) Cf. J. DELORS : Mes quatre vérités, In "Le Nouvel Observateur" N°2044 du 8-14/1/2004.

 

Page précédente

Page suivante

Publicité
Publicité
Commentaires
Publicité