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Histoire électorale de Banyuls sur mer
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Claude Razouls-1

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27 août 2017

47 - Législatives du 16 mars 1986

47 - Législatives du 16 mars 1986

 

La nouvelle majorité présidentielle avait prévu dans son programme une réforme du mode de scrutin (1): le retour à la représentation proportionnelle à un seul tour comme sous la IVe République. Le scrutin d'arrondissement majoritaire à deux tours qui personnalisait les candidatures est donc remplacé à la suite du vote des communistes et des socialistes (seul Michel ROCARD n'y étant pas favorable a démissionné du gouvernement  FABIUS).

L'échec de la réforme d'Alain SAVARY sur l'école et l'annonce par François MITTERRAND d'un référendum qui n'aura jamais lieu (faute d'un référendum . . . sur le référendum!), mais surtout la politique de rigueur et d'austérité menée par le nouveau Premier ministre Laurent FABIUS et son ministre de l'Economie et des finances Pierre BÉRÉGOVOY (dévaluations successives et CEE obligent), ont créé  beaucoup de déceptions dans l'électorat de gauche.

L'affaire du Rainbow-Warrior le 10 juillet 1985 n'a pas rehaussé le prestige du gouvernement, et moins encore celui du ministre de la Défense nationale Charles HERNU ("Hernucléaire" comme le dénomme "Le Canard enchaîné"), sans parler des ventes d'armes à l'étranger, avec le soutien des syndicats de ces entreprises.

La crête des deux millions de chômeurs est dépassée, des nouveaux pauvres font leur apparition comme du temps de l'Abbé PIERRE en 1954. COLUCHE créera pour eux les "restaurants du cœur" pour l'hiver.

Le Parti communiste n'est pas entré dans le gouvernement FABIUS . . . mais un peu tard pour son image de marque.

L'opposition UDF et RPR n'a qu'un remède miracle : le libéralisme économique (vanté à tout propos par le fringant François LÉOTARD).

Quant à LE PEN, leader du Front national, qui dénonce la bande des quatre, le seul remède contre le chômage et l'insécurité consiste à reconduire les immigrés d'où ils viennent.

 

Dans ce contexte, les élections législatives ne se présentent pas au mieux pour la majorité sortante . . . et pourtant absolue, donc bien responsable. Mais que peuvent les politiques face à une pression économique mondiale (2).

 

Dans le département, sept listes sont en présence :

 

1- Liste pour une majorité de progrès avec le président de la République, présentée par le Parti Socialiste, conduite par Renée SOUM (député sortant), Pierre ÈSTÈVE (maire, conseiller général de Saint-Paul-de-Fenouillet), François BEFFARA (maire de Millas), Henri VUILLEMIN et Daniel GINESTE (conseillers municipaux de Perpignan), Michel JOMAIN (directeur du GICB).

2- Liste du Parti socialiste catalan, conduite par Claude GENDRE, Paulette DUMONS, Robert CARRÈRE, Jean-Louis PRAT, liste de dissidents de la fédération départementale du PS.

3- Liste présentée par le Parti communiste français, conduite par André TOURNÉ (député sortant), Jean VILA (maire de Cabestany), Colette TIGNÈRES (conseiller municipal de Perpignan), Alain NUNEZ (maire et conseiller général d'Olette), Henri PUYOL (maire de Corbère-les-Cabanes), Simone PARROT (conseiller municipal d'Alenya).

4- Liste d'Union de l'Opposition Nationale (RPR-UDF) conduite par Claude BARATE (Maître de Conférences à l'Université de Perpignan, 1er adjoint à la mairie de Perpignan, conseiller général et viticulteur), Jacques FARRAN (Président de la Chambre de commerce et d'industrie, vice-président du conseil général), Michel BERDAGUER (conseiller général de Perpignan), André BASCOU (maire de Rivesaltes).

5- Réussir en Roussillon conduite par Gérard AMIEL, Marc ESPI, Daniel DEDIES et Sophie FISSÉ.

6- Liste de Rassemblement National (3) présentée par le Front national et Jean-Marie LE PEN, conduite par Pierre SERGENT, Alain GILABERT, Mourad KAOUAH (ancien député d'Algérie), Agnès DE CACQUERAY, Jean BRUNET et Francis MOUCHE.

7- Liste MPTT (Parti des Travailleurs) d'André BONET.

 

Résultats :

                        Banyuls                        Département                       Métropole

Inscrits:         3641 (+ 385 / 1981)            246.432                         36.614.738

Abst.:               702   (19,28% )                 (20,10%)                       (21,50%)

Votants:        2939   (80,72% )                 (79,90%)                       (78,50%)

Blancs:             187   (  6,36% )                 (  4,35%)                       (  4,33%)

S.Expr.:        2752   (75,58% )                 (76,45%)                       (76,10%)

PCF:                352   (12,79% S.E)           (15,91% S.E)               

PS:                   790   (28,71% --)              (25,86% --)                  

PSC:                  88   (  3,20% --)              (  2,63% --)                  

MPTT:                7   (  0,25% --)              (  0,56% --)

RPR-UDF:   1070   (38,88% --)              (33,96% --)                  

Réussir:             56   (  2,03% --)              (  2,00% --)                  

FN:                 389   (14,14% --)               (19,08% --)                  

 

Métropole: Extrême gauche: 1,5% S.E.; PCF: 9,70% S.E.; PS + MRG: 31,60% S.E.; ; Ecologistes: 1,3% S.E. (mais 2,74 % S.E. dans les circonscriptions où ils sont présents); Divers gauche: 1,2% S.E.; RPR-UDF: 42,10% S.E.; Divers droite: 2,5% S.E.; FN: 9,70% S.E.

 

Remarques :

Les abstentions sont beaucoup plus faibles qu'au premier tour des législatives de 1981 (-10,76%), et même de celles du second tour (-3,57%) démontrant que les électeurs ont parfaitement pris conscience de l'enjeu de ce scrutin. Le couplage de cette élection avec celle de la désignation des conseillers régionaux a pu aussi jouer un rôle plus attractif. Il est évident, a posteriori, que lors d'une élection à deux tours, des électeurs attendent de voir pour voter utile, ou n'aiment pas les choix diversifiés. Le nombre de 10% environ d'abstentions en moins correspond à ce qui avait été estimé antérieurement comme valeur approximative du "chassé-croisé" des électeurs entre deux tours.

Le pourcentage des votes blancs et nuls augmente aussi très sensiblement (+4%) correspondant à des électeurs (près de 150) qui n'aiment pas ce type de scrutin qui favorise par trop les grands partis nationaux.

Le PCF subit un recul sensible (-66 voix/ 1981) qui traduit un malaise au sein du parti, et plus encore des sympathisants "déçus du socialisme".

Le PS pour les mêmes raisons perd également des voix (-93/1981). Fait d'autant plus grave compte tenu de 385 inscrits de plus depuis les précédentes législatives. En pourcentage le recul est de 11 %.

Les socialistes dissidents n'affaiblissent pas réellement le PS avec 3,2% des S.E. Le total de leurs voix avec celles de SOUM redonne le score du 2 ème tour de 1981 (878 contre 883). Il y a bien 88 socialistes anti-SOUM à Banyuls (soit 10%), mais plus vraisemblablement d'ex-votants PSU.

Au total la gauche fait 1237 voix contre 1517 en 1981, d'où une perte de 280 voix, soit -18,5%.

L'opposition UDF & RPR progresse d'un coup en voix (+234/1er tour 1981), mais moins en pourcentage (+1,32%). Le progrès l'est aussi par rapport au 2 ème tour de 1981 (+130 voix), mais cette fois le candidat n'est plus Paul ALDUY mais Claude BARATE (RPR), ce qui explique le faible accroissement.

Le Front national, dont la percée était apparue lors des élections européennes de 1984, progresse encore (389 - 232 = +157). Ses électeurs avaient donc voté utile lors des cantonales de 1985 (76 voix sur 232). Avec 389 voix, le FN passe devant le PCF à Banyuls comme dans le département ! Il faut donc s'attendre à ce qu'il en soit de même lors des municipales de 1989 (sauf reflux improbable du FN dans le contexte actuel, ou un faux-pas de son fougueux leader).

De là on peut ventiler les 385 nouveaux inscrits comme suit: 150 pour le FN,130 pour l'UDF+RPR, soit un total de 280, reste 105. Les blancs et nuls ont augmenté de +132/ 2 ème tour 1981, on peut supposer qu'une partie de ceux-ci proviennent des nouveaux inscrits, mais plus probablement d'électeurs de gauche (les 280 voix manquantes), disons un chassé-croisé moitié, moitié.

 

Conclusion :

Le nombre des députés ayant été porté à quatre pour le département, Mme Renée SOUM retrouve son siège, mais trois députés nouveaux de l'opposition l'accompagnent : Claude BARATE (RPR), Jacques FARRAN (UDF) et Pierre SERGENT (FN).

 

La nouvelle Assemblée nationale comprend : 33 PCF, 2 divers gauche, 210 PS+MRG, 128 UDF, 161 RPR, 6 divers droite, 33 FN.

Surprise relative, la majorité sortante est devenue l'opposition rentrante (ce qui vaudra pas mal de lapsus de la part des commentateurs à la radio ou la télévision).

Le groupe RPR étant le plus nombreux, François MITTERRAND, dans la grande tradition de l'ex-IVe République, appellera Jacques CHIRAC comme Premier ministre d'une cohabitation naissante (4). Elle a été préparée avant même l'élection par BALLADUR (l'un des conseillers de CHIRAC), ce que Raymond BARRE critiquera en termes très vifs, se "plaçant" ainsi pour l'avenir.

La cohabitation débute dans de tristes circonstances (ce qui rendrait toute crise de régime incomprise des Français (5) en raison des graves attentats terroristes à Paris qui répondent, entre autres, à notre aide militaire à l'Irak en guerre contre l'Iran)(6). Plusieurs otages français sont de plus prisonniers au Liban, où se déroulent des luttes fratricides sans fin.

Charles PASQUA (gaulliste de toujours) devient ministre de l'Intérieur et déclare qu'il faut "terroriser les terroristes" (7). Le bilan entre le 3/3 et le 15/12 sera de 12 morts et 236 blessés. L'auto-vigilance des Parisiens et un renforcement policier éviteront que le bilan ne s'alourdisse.

 

Notes annexes :

(1) Certains ont voulu y voir (à tort) un piège consistant à favoriser le Front national afin de gêner la droite. Deux raisons au moins ont conduit à modifier le mode de scrutin: le programme de 1981 du Président, et le désir de limiter au maximum la victoire plus que prévisible de la droite. 

(2) Cf. Viviane FORRESTER: L'horreur économique. Fayard (1996), et la réponse d'Alain MINC: La mondialisation heureuse. Edit. Plon (1997).

(3) L'objectif des législatives a conduit Le Pen à donner des investitures à des personnalités, souvent socioprofessionnelles. Cf. Guy BIRENBAUM: Le Front national en politique. Edit. Balland (1992).

(4) : La Constitution de la Ve n'étant pas celle de la IVe, rien n'obligeait MITTERRAND à choisir CHIRAC. On pouvait penser que le choix le plus "logique" se porterait sur CHABAN-DELMAS, et ceci pour de multiples raisons. La désignation de CHIRAC n'est sans doute pas tout à fait innocente, puisque le Premier ministre ne peut être qu'en état d'infériorité par rapport au Président dans le domaine de la popularité. Quelles sont les raisons qui ont alors poussé le leader du RPR a prendre un tel risque ? Il semble que BALLADUR ait convaincu CHIRAC que la conquête de l'Élysée passait par Matignon. Ceci n'est vrai que dans le cas d'une réussite toujours aléatoire.

(5) Les sondages montrent que celui qui provoquerait une crise de régime verrait sa carrière politique compromise.

(6) En ce qui concerne les ventes d'armes à l'Irak: voir in Hans LEYENDECKERL et Richard RICKELMANN: Marchands de mort. Edit. Olivier Orban (1990). Cf. Patrice DE MERITENS & Charles VILLENEUVE:  Les Masques du terrorisme. Edit. Editions N°1 Fixot (1991); et l'excellente émission télévisée sur France 3: Pièces à conviction, du jeudi 30 décembre 2002, qui rappelle les relations privilégiées entre les gouvernements français et irakien depuis 1974 . Notre aide militaire dans la guerre contre l'Iran a été même plus loin que la seule vente d'armes. Il est vrai que le gouvernement français n'est pas le seul, mais était-ce une excuse de s'impliquer dans un tel conflit? Le rôle du FIS algérien peut également être invoqué.

(7) Cf. Pierre PELLISSIER: Charles PASQUA. Edit. JCLattès (1987).

 

 

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